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Je m’appelle Christine et suis tombée malade il y a 10 ans : un burn-out et une dépression. J’ai d’abord été hospitalisée en hospitalisation complète pendant quelques mois et puis je suis sortie et j’ai fait différents hôpitaux de jour.

Dans l’un d’eux, une pair-aidante est arrivée. C’était une ancienne patiente.

Une de mes craintes, comme elle me connaissait avant d’être présente, c’est qu’elle ait accès à mon dossier médical, qu’elle sache le détail de ce qui me concerne. J’ai demandé au médecin chef qui m’a certifié qu’elle n’aurait pas accès au dossier et qu’elle ne fréquenterait pas non plus les réunions d’équipe. Ca m’a mise à l’aise. Le fait qu’elle ne participe pas aux réunions d’équipe était rassurant parce que quand on ne va pas bien on dit pas toujours des choses dont on est fier et je n’avais pas envie qu’elle sache le fond du problème.

J’en ai discuté avec elle et elle a trouvé que c’était normal que j’aborde ce sujet-là et qu’il n’y avait pas de problème, qu’elle ne saurait rien et que cela resterait secret.

Cela m’a aidé beaucoup de discuter avec elle. Elle venait avec nous pendant la pause-cigarette ou la pause-café. On discute pas mal de ce qui se passe dans nos vies et sur le terrain. J’ai remarqué que c’était plus facile de discuter avec elle que de discuter avec un membre du staff parce que, tout simplement, la discussion était informelle. Je ne me sentais pas jugée non plus vu qu’elle était passé par des moments difficiles dans sa propre vie. Ça nous permettrait aussi de nous livrer plus facilement parce que on savait qu’elle pouvait comprendre ce qu’on traverse à ce moment-là puisqu’elle a vécu la même chose, le même mal-être.

La chose principale, c’est d’avoir traversé un mal-être et une fois qu’on a traversé un mal-être et qu’on rencontre d’autres personnes dans le même cas, il y a toujours quelque chose qui nous rapproche. On prend un peu de recul et on voit la vie avec un autre regard

C’était vraiment un échange avec la pair-aidante et, moi, ça m’a permis d’avancer.

Sa place était un peu entre les deux. L’équipe est comme au-dessus dans l’escalier et moi j’étais en bas. La pair-aidante était, elle, au mieux de l’escalier, elle faisait le lien entre le bas et le haut.

Ça m’a aussi aidée à parler à l’équipe car je savais qu’elle pouvait aussi faire le lien en cas de gros problème. Elle était plus mature, elle avait plus du recul que moi. Je pouvais voir en elle comme une grande sœur. Je me sentais à l’aise en tout cas, oui. Elle m’a laissé son numéro de GSM et elle m’avait dit que je pouvais l’appeler pour aller boire un verre de temps en temps.

J’étais en interaction avec elle pendant les repas, pendant les ateliers auxquels elle assistait. Elle n’avait pas peur de prendre la parole. Elle partageait comment ça s’était passé pour elle. C’était un plus pour l’atelier car cela permettait aussi de faire se rejoindre le cadre posé par l’animateur, avec le vécu des bénéficiaires.

Je me souviens d’un moment où je m’auto-mutilais beaucoup. Je lui en ai parlé et elle m’a posé beaucoup de questions car elle ne connaissait pas vraiment pourquoi on aurait s’automutile. Elle voulait comprendre le pourquoi du comment. Elle ne m’a pas prise pour une extraterrestre. C’était important car j’avais honte de ça, je n’en parlais pas facilement avec l’équipe. Ça m’a aidée à aller de l’avant, à ne pas trop culpabiliser, à m’auto-flageller parce que je faisais ça.

Je connais la formation à la pair-aidance de l’université de Mons parce que l’infirmier chef m’en avait parlé. Il m’avait dit que je pouvais peut-être la faire parce qu’il me voyait bien dans ce rôle-là. Mais, maintenant que je me sens un peu mieux, j’ai envie de laisser ce qui est psychiatrie derrière moi et aller de l’avant et recommencer une nouvelle vie. Ce n’est pas parce que qu’on a vécu des souffrances dans sa vie, qu’on se destine à la pair-aidance je crois. C’est une démarche vraiment volontaire d’utiliser son expérience pour la partager avec d’autres. Et puis la formation ne fait pas tout, c’est aussi la manière dont agit, on a de l’empathie ou on en a pas.

Pour être pair-aidant, il faut quand même y avoir une formation pour ne pas se laisser marcher sur les pieds, pour prendre un certain recul. Quand on est un soignant, on a une base d’études. En tant que pair-aidant, il faut quand même quelque chose même si on a la fibre ou on ne l’a pas. C’est une question de personnes car la confiance, c’est la base de la relation.

Pour finir, j’irai que des entretiens comme celui-ci il sont assez importants car ils permettent peut-être de faire découvrir aux gens qui ne connaissais pas la pair-aidance , ce que c’est et suivre un peu l’exemple d’autres pays anglo-saxon où la pair-aidance est déjà bien développée. Ce serait bien de faire entrer la pair-aidance dans les pratiques. Cela répond à un besoin et permet certainement de faire des économies de mutuelle. Les hospitalisations complètes pourraient être réduites avec la présence d’un pair-aidant en hôpital de jour où ce genre de chose.