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2.5. LA DESCRIPTION DU RÔLE DE PAIR AIDANT

À l’heure actuelle, il n’y a pas de définition du soutien par les pairs universellement reconnue, mais le terme fait généralement référence à un soutien mutuel offert par des personnes ayant traversé des expériences de vie similaires et difficiles.
Ce qui distingue clairement les pairs aidants des autres intervenants, c’est l’obligation pour les titulaires d’un poste de pair aidant d’utiliser et de partager leur savoir expérientiel découlant de leurs propres expériences avec un trouble mental et le
rétablissement.1

2.5.1 Définition du pair aidant

La définition et la spécificité du pair aidant retenues par le Programme québécois Pairs Aidants Réseau sont inspirées de plusieurs sources.2 Cette définition se réfère au rôle joué par un pair aidant travaillant au sein des services de santé mentale.

Définition du rôle de pair aidant

Le pair aidant est un membre du personnel divulguant qu’il vit ou qu’il a vécu un trouble mental. Le partage de son vécu et de son histoire de rétablissement a pour but de redonner de l’espoir, de servir de modèle d’identification, d’offrir de l’inspiration, du soutien et de l’information auprès de personnes qui vivent des situations similaires à celles qu’il a vécues.3

 2.5.2 La spécificité du pair aidant

Utilisation et partage du savoir expérientiel

Essentiellement, le travail de pair aidant est basé sur l’utilisation et le partage de son savoir expérientiel dans ses interventions auprès de ses pairs et de l’équipe de travail.

« Le savoir expérientiel du pair aidant lui permet de se centrer sur le cheminement de l’usager et de bien en saisir toute la charge émotionnelle. Ce savoir lui est aussi très précieux pour aider la personne à apprendre de ses expériences positives et négatives. Basé sur l’apprentissage par modeling (Bandura, 1980,1986), l’usager observe chez le pair aidant des attitudes ou des comportements qu’il perçoit comme étant souhaitables pour lui-même et qui peuvent l’aider à se rétablir. Les stratégies de restauration et de promotion de la santé en sont un exemple. Bref, le rétablissement du pair aidant et l’utilisation de sa propre expérience aux bénéfices des autres usagers représentent des atouts fort appréciables pour motiver ces derniers à s’engager plus à fond sur la voie du rétablissement et à croire et espérer en un avenir plus prometteur. » (Provencher, Lagueux et Harvey, 2010)4

Le pair aidant a vécu des expériences partagées ou similaires à celles de ses pairs. Selon ses expériences de vie reliées au trouble mental et à son processus de rétablissement, il détient un savoir expérientiel lui conférant un grand nombre d’habiletés et de connaissances, telles que :5

  • le sentiment d’être envahi par une souffrance émotionnelle intense ou par des délires;
  • l’expérience d’être diagnostiqué, hospitalisé et médicamenté;
  • l’utilisation des services dans le réseau de la santé mentale et des autres ressources dans la communauté;
  • la perte d’estime de soi et l’auto-stigmatisation;
  • la compréhension des obstacles que la personne utilisatrice affronte, tels que l’exclusion, la pauvreté et la stigmatisation;
  • l’identification des problèmes, la responsabilisation, les stratégies pour faire face aux difficultés;
  • l’empathie, la tolérance, la flexibilité;
  • la démarche de réadaptation et le franchissement des étapes dans le processus de rétablissement.
  • etc…

La spécificité

Afin de préserver la spécificité de son rôle, le pair aidant

1. partage et utilise son savoir expérientiel lors de ses interventions auprès de ses pairs et de son équipe de travail ;

2. utilise l’autodivulgation ;

3. sert de modèle d’identification

4. suscite l’espoir à ses pairs et à leurs proches ainsi qu’aux intervenants ;

5. transpose ses propres expériences au bénéfice de ses pairs et des membres de l’équipe;

6. sert de modèle de motivation pour ses pairs et renforce chez eux la croyance que le rétablissement est possible;

7. soutient et responsabilise ses pairs dans la reprise du pouvoir sur leur vie et dans leur processus de rétablissement;

8. apporte son expertise et maintient présentes dans l’équipe les préoccupations envers la diminution de la stigmatisation, la nécessité de redonner de l’espoir et d’assurer la pleine participation de la personne utilisatrice au choix des services.

2.6 LES TÂCHES ET LES RESPONSABILITÉS
DU PAIR AIDANT

Les tâches et les responsabilités du pair aidant peuvent varier d’un endroit à l’autre. Elles doivent s’inscrire en respect des besoins et des rêves des personnes accompagnées et dans une démarche de rétablissement.

Avant l’embauche du pair aidant, il est essentiel que ses tâches soient clairement identifiées et qu’elles soient directement en lien avec son rôle spécifique de pair aidant. Par contre, des tâches communes aux autres intervenants sont bien souvent ajoutées à la description de tâches.

Voici un exemple de tâches que le pair aidant pourrait accomplir dans son travail. Quelques-unes de ces tâches devraient se retrouver dans sa description d’emploi.

Exemple d’une description de tâches pour le poste de pair aidant 6

La responsabilité première du pair aidant est d’offrir des services d’intervention conçus pour aider les personnes utilisatrices à reprendre le contrôle sur leur propre vie ainsi que dans leur processus de rétablissement.

À partir de son savoir expérientiel, le pair aidant a pour tâches de :

1. Servir d’agent de rétablissement

a) susciter l’espoir que le rétablissement est possible aux personnes vivant un trouble mental, à leurs proches ainsi qu’aux intervenants;
b) enseigner et démontrer la valeur du savoir expérientiel de chaque individu;
c) transmettre des méthodes efficaces d’adaptation et d’autodétermination;
d) lutter contre les préjugés et la discrimination envers les personnes utilisatrices en

    • sensibilisant le personnel et les proches à leurs préjugés et à leur façon souvent involontaire de stigmatiser la personne utilisatrice;
    • aidant ses pairs à combattre la stigmatisation et l’auto-stigmatisatione) amener un regard différent auprès de l’équipe, ce qui facilite la compréhension des problèmes vécus par la personne utilisatrice et des stratégies à employer pour la soutenir;e) amener un regard différent auprès de l’équipe, ce qui facilite la compréhension des problèmes vécus par la personne utilisatrice et des stratégies à employer pour la soutenir;
      f) défendre les droits et les intérêts des personnes utilisatrices;
      g) aider ses pairs dans l’accroissement de leur pouvoir d’agir sur leur vie et l’acquisition des habiletés nécessaires pour défendre leurs droits et leurs intérêts;

2. Utilisation du processus de rétablissement selon les cinq étapes

a) aider ses pairs à se situer dans leur processus de rétablissement;
b) identifier avec eux les obstacles personnels pouvant être rencontrés à travers les cinq étapes;
c) accompagner ses pairs dans la définition et la réalisation de leurs objectifs pour leur rétablissement;
d) utiliser et promouvoir les outils d’intervention des pairs aidants afin d’aider les personnes à franchir les obstacles pouvant se présenter à chacune des étapes du rétablissement;
e) observer et souligner les progrès que ses pairs font dans leur démarche pour atteindre leurs objectifs.

 3. Utilisation de la formation spécifique en intervention par les pairs

a) divulguer adéquatement son histoire;
b) poser des questions qui permettront aux personnes de trouver leurs propres réponses et de s’engager dans une démarche de changement;
c) créer des relations favorisant le rétablissement;
d) enseigner à ses pairs que l’insatisfaction personnelle peut être une avenue de changement pour eux;
e) accompagner ses pairs lorsqu’ils affrontent leurs peurs et leur enseigner comment les vaincre;
f) développer et animer un groupe axé sur le rétablissement;
g) animer un groupe éducatif au sujet du Plan d’action pour le rétablissement de la santé (PARS);
h) guider les personnes dans la création de leur Plan d’action pour le rétablissement de la santé (PARS);
i) enseigner à ses pairs comment identifier et combattre la dépréciation de soi (discours intérieur négatif);
j) utiliser les forces de la personne dans les interventions;
k) participer à l’élaboration d’un plan d’intervention ou projet de vie;
l) aider les personnes à identifier des stratégies de rétablissement;
m) encourager leur choix professionnel et les aider à mieux gérer leur anxiété face à la recherche d’un emploi en les accompagnant dans la rédaction de leur Plan d’action pour le rétablissement au travail;
n) assister aux rencontres d’équipe et promouvoir l’utilisation d’approches favorisant le rétablissement et le pouvoir d’agir des personnes utilisatrices;
o) offrir des capsules d’information sur différents sujets traitant du rétablissement;
p) intervenir auprès de ses collègues à titre de consultants.
q) assister les personnes utilisatrices dans l’obtention des services qui conviennent à leurs besoins pour leur rétablissement;
r) informer ses pairs à propos des services de soutien dans la communauté (par exemple, suivi communautaire, groupes d’entraide mutuelle, groupes de défense de droits et d’intérêts, organismes communautaires) et de l’utilisation de ceux-ci dans leur processus de rétablissement;

4. Développement de pratiques axées sur le rétablissement et sur l’intervention par les pairs et participer à une communauté de pratique

a) continuer de prendre connaissance de la documentation et de l’information reliées au rétablissement en les partageant avec les autres pairs aidants et l’équipe de travail;
b) demeurer à l’affût des ressources offrant des services axés sur le rétablissement;
c) assister aux activités de formation continue offertes par le programme de formation pour pairs aidants;
d) participer aux rencontres, aux activités de formation et aux séminaires offerts par le milieu de travail;
e) participer à divers congrès;
f) au besoin, utiliser les rencontres de supervision clinique offertes par le programme Pairs Aidants Réseau;
g) utiliser le mentorat dans le milieu de travail;
h) s’intégrer dans l’Association des pairs aidants du Québec;
i) participer aux journées de ressourcement offertes par le programme Pairs Aidants Réseau.

Références

1Repper, J. et Tim Carter (2010). Using personal experience to support others with similar difficulties. A review of the literature on peer support in mental health services. The University of Nottingham. Together for mental wellbeing. Royaume-Uni. Traduit et adapté de l’anglais par Daniel Gélinas, M.Sc.(2011)
2Ontario Ministry of Health. Recommended Standards for Assertive Community Treatment Teams, 1998.

Ibid note 14

GCPSP Georgia certified peer specialist project, online, CPS job description, www.gacps.org/jobdescription

Gélinas, D., Participation grandissante des utilisateurs au sein des services de santé mentale. le partenaire, vol. 14, no 1, été 2006.

Association des hôpitaux du Québec. (2004). Guide pratique pour les équipes de suivi intensif dans la communauté. Montréal.
3Repper, J. et Tim Carter (2010). Using personal experience to support others with similar difficulties. A review of the literature on peer support in mental health services. The University of Nottingham. Together for mental wellbeing. Royaume-Uni. Traduit et adapté de l’anglais par Daniel Gélinas, M.Sc.(2011)
4 Provencher, H. Lagueux, L. et Harvey, D. (2010). Quand le savoir expérientiel influence nos pratiques…l’embauche de pairs aidants à titre d’intervenants à l’intérieur des services de santé mentale. Revue
Analyses : Pratiques de formation. Université Paris 8. No 58-59. Janvier-juin 2010.
5 Inspiré de Champlain District Mental Health Implementation Task Force (2002). Foundations for Reform, Ontario. ** Agence de santé publique du Canada (2002).
6 Inspiré de GCPSP (Georgia Certified Peer Specialist Project) Online, Job description, http://www.gacps.org/JobDescription.html.

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